The death of environmentalism » est un court essai (36 pages)
rédigé récemment par 2 américains, Michael Shellenberg et Ted
Nordhaus. Ce texte qui circule très largement sur le web a été
très remarqué, notamment par le magazine économique britannique "The
Economist" qui lui consacra sa couverture le 23 avril dernier.
Le propos du texte part d'un constat paradoxal: Comment, après
tant d'années de lutte écologique, et devant l'évidence désormais
frappante d'une menace climatique que plus personne ne conteste,
comment donc devant cet échec, le mouvement environnementaliste
peut il se ressaisir pour faire reconnaître ses idées?
Les auteurs le reconnaissent d'entrée: les écologistes semblent
incapables de trouver la solution à la crise planétaire et surtout
leur mouvement est aujourd'hui beaucoup plus faible qu'il ne
l'était il y a un peu plus d'une dizaine d'années.
Le problème résiderait dans une vision étriquée du problème
environnemental: " Nous ne serons jamais capable de progresser
tant que nous considérerons nos échecs comme essentiellement
tactiques et nos propositions comme essentiellement techniques".
Selon les auteurs, la conception même de l'environnement comme
quelque chose qui nous serait extérieur n'aide pas à faire passer
nos idées, il faudrait faire comprendre que "l'environnement,
c'est nous", que nous sommes partie intégrante de cette nature et
que l'environnement n'est pas seulement "ce qui nous environne".
Pourquoi la guerre et la pauvreté ne sont pas considérées comme
des problèmes d'environnement, alors que le problème du climat en
serait un? Il faudrait que les environnementalistes s'interrogent
sur ce qu'ils peuvent apporter à ceux qui ne partagent pas leurs
idées, et non toujours à voir le problème sous l'angle "que
peuvent faire nos adversaires pour nous et nos idées?". Il
faudrait aussi réfléchir aux termes que nous employons, car le
public n'est pas contre l'idée d'un "réchauffement "climatique (
surtout 6 mois par an) et pas opposé à un " changement
"climatique, car nous ne sommes pas non plus opposés à l'idée de
changement. ( Plutôt parler de "menaces"climatiques, ou de
"dérèglement" climatique).
Les auteurs s'interrogent également sur l'idée que le public
serait partisan de la cause écologique, du moins à la lecture des
sondages. Ils concluent " la protection de l'environnement est
défendue par une large majorité du public, le problème est qu'elle
n'est pas défendue avec force". Les sondages ne mesurent pas, en
effet, l'intensité de la mobilisation potentielle, et là, la
déception a pu être importante.
D'autant que, en dehors de "spasmes" de coopération, les
environnementalistes n'ont jamais joué la solidarité de leurs
actions et il y a eu trop peu d'action commune. La division à
régnée.
Considérons le dérèglement climatique, au lieu de tempêter sur
l'inaction du gouvernement, avons nous nous-mêmes essayé de
comprendre quels étaient les freins réels à une action positive ?
La pauvreté dans le monde, le libéralisme et la mondialisation,
l'argent, le lobby des groupes de pression, notre incapacité à
proposer une vision positive, l'aile droite du parti républicain
?... Souvent nous nous en tenons à une idée fixe ". Il y a trop de
carbones dans l'atmosphère" et cela nous empêche d'aller chercher
plus loin comme si le fait même de le faire savoir était un
élément décisif de la solution.
C’est en fait toute une réflexion sur nos valeurs et modes de
pensée qui est ici appelée : « les racines de l’échec tiennent
beaucoup à ce qu’on désigne aléatoirement certaines choses comme
relevant de l’écologie et d’autres non ». L’écologie ne peut
gagner en s’opposant à l’économie, nous devons promouvoir l’idée
d’une écologie qui ne soit pas éternellement considérer comme un
obstacle à la vie des affaires. L’idée d’une écologie créatrice de
richesses et d’emplois qui soit acceptable politiquement : « Qui
se soucierait d’une taxe carbone qui serait la mieux adaptée, la
plus simple et la plus efficace si elle était politiquement
inacceptable. ? »
Il est donc nécessaire d’opérer une réelle remise en question,
de s’interroger sur nos échecs et d’arrêter de concevoir nos
problèmes comme « environnementaux » et nos solutions comme «
techniques ».
Les autres voies de progrès sont :
. L’économie : « La première vague de l’écologie s’est centrée
sur la conservation, la seconde sur la régulation, il faut
maintenant penser à celle de l’investissement »
. L’ouverture et le décloisonnement : « Nous voulons que le
public s’intéresse à la menace climatique, mais aussi à
l’extinction des espèces, à la sur-pèche, aux effluents
toxiques,.. »
. Le langage : les confrontations entre écologistes et hommes
d’affaires sont des dialogues de sourds : vous voulez créer des
emplois, moi je veux sauver la planète !
. Etre positif. Michael Shellenberg et Ted Nordhaus prennent
ici l’exemple du discours de Martin Luther-King « I have a dream »
: « Imaginez ce que l’histoire aurait retenu et l’effet produit si
Martin Luther King avait fait un discours « J’ai fait un cauchemar
!»». La cause de l’environnement ne doit pas chercher toujours à
se construire en opposition.
. Agir : « Récompensez également le succès et l’échec, punissez
seulement l’inaction ». Beaucoup d’environnementalistes ont cette
conception qu’il suffit de connaître la véri-té pour qu’elle se
propage et que l’action suive. Pour cela, on passe son temps à
faire des colloques qui débouchent sur des créations
d’observatoires. Il faut totalement re-voir notre mode de pensée
et de fonctionnement si nous voulons qu’à l’avenir la cause
environnementale soit d’avantage reconnue et surtout efficace.
Michael Shellenberg est un stratège en organisation. Il est le
directeur exécutif du breakthrough Institute :
http://www.thebreakthrough.org
Ted Nordhaus est vice président d’une agence conseil
spécialisée en études sur les valeurs et les opinions.
http://www.evansmcdonough.com
Ils ont travaillé ensemble sur le nouveau projet Apollo
consistant à réduire la dépendance pétrolière aux USA :
http://www.appoloalliance.org
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