Le cyberlobbying et les sites web de crises deviennent légions.
Mais comme nous le répétons souvent, les contours du cyberespace
échappent encore aux conseils en relations publiques qui trop
sûres de leurs prestations sous-estiment l’intelligence du réseau.
C’est ainsi que les mots clés cachés dans le code source des sites
web de crise trahissent les opérations de relation publique, pour
un bénéfice négligeable.
Les mots clés sont destinés aux moteurs de
recherche. Ils sont insérés dans le code de la page web et
théoriquement invisibles aux yeux des internautes. Leur
invisibilité supposée reste une source d’erreurs dans les
relations publiques sur internet car n’importe quel débutant peut
accéder à ces mots clés comme nous le verrons ci-dessous. C’est
ainsi que l’on découvre que les semenciers pro-ogm utilisent
volontiers le terme « malbouffe » pour se faire référencer et
Total la phrase « Total travail forcé » que personne n’oserait
afficher sans risque, nous verrons que Total maîtrise pourtant
parfaitement le référencement. Pourquoi laisser à la portée du
public des éléments aussi négatifs pour les RP ? Surtout que,
comble de la stupidité, les mots clés ne sont pratiquement plus
utilisés par les moteurs de recherche 1, notamment google qui
représente plus de 60% des recherches réalisées en France 2 ce qui
est de notoriété publique. Voici deux mini études de cas
édifiantes.
Cyberlobbying : OGM et ePR, les mots clés trahissent les
intentions des grands semenciers
Ogm-debats.com, dont nous avons déjà parlé, est
une opération de relations publiques « pro ogm » trop ostensible
(voir ostentatoire) pour être crédible.
Le site édité par une association qui ne
regroupe pas moins que BASF, Bayer CropScience, Dow AgroSciences,
DuPont-Pioneer Semences, Monsanto et Syngenta cache en son sein
une petite perle qui révèle ses intentions.
En effet, les mots clés cachés dans les balises du site sont :
" alimentation, santé, agriculture,
agro-biotechnologies, biotechnologies, cultures, développement
durable, environnement, écologie, OGM, gènes, génétiquement
modifié, transgénique, transgène, transgenèse, plantes,
biotechnologies, pestiticides,
règlementation, mondialisation,
malbouffe, Biosécurité, bio-diversité, biodiversité,
brevetabilité, Brevets sur le vivant, agriculture durable, faim
dans le monde ", fautes d’orthographes comprises : cette erreur
restera dans la petite histoire des ratés du cyberlobbying.
Web de crise de Total en Birmanie, des mots clés qui en
disent trop
Total communique fortement sur la crise Birmane
depuis un site Web http://birmanie.total.com/ dédié à cette crise…
mais interdit de faire un lien vers ce site sans autorisation.
Dommage pour le crédit du site qui en revanche cherche à se faire
référencer (contradictoire, non ?). Car faute de pouvoir réaliser
un lien vers ce site, il nous reste le droit d’analyse.
Et comme pour Debat, la liste des mots clés du site est
intéressante à parcourir (le 21 février 04) :
" Aung San Suu Kyi,travail forcé Birmanie,droits
de l’homme Birmanie,junte militaire Birmanie,dictature
Birmanie,actions Birmanie,economie Birmanie,Birmanie,Myanmar,Total
Birmanie,Total Myanmar,gazoduc Birmanie,pétrole Birmanie,gaz
Birmanie,Yadana,Total Birmanie Yadana,projet Yadana,Total droits
de l’homme,Total travail forcé,MOGE Total ".
On découvre donc dans la liste des mots clés
l’expression « Total travail forcé » et ce n’est pas nous qui le
disons. Ils ont pour eux d’éviter au moins les fautes
d’orthographe : nous progressons lentement. Mais chez Total la
maîtrise du référencement est réelle. Ainsi, il est par exemple
possible de faire la différence entre un visiteur réel et par
exemple le robot d’indexation de google et de ne pas renvoyer la
même page selon le cas. Ainsi, si vous faîtes une recherche sur
google avec les mots clés " total travail forcé ", vous trouverez
le site web de Total en premier, et pour cause.
Sur google apparaît le lien « Total et le
travail forcé en birmanie : le droit de réponse de… ». Si vous
cliquez sur ce lien, vous serez dirigé vers la racine du site,
http://birmanie.total.com. Mais ceci est un leurre : voici comment
au 21/02/04 google voit une des pages du site web de Total en
Birmanie auquel vous n’aurez pas accès facilement :
Voir la
copie d'écran
Ci-dessus vous avez la copie d’écran du contenu
de la mémoire cache du moteur de recherche
google pour la page
officielle « http://birmanie.total.com/fr/travail-force-birmanie.html
». Cette méthode aurait pu être améliorée, car il suffit d’une
balise pour interdire à google de conserver la page en cache, mais
de la prendre cependant en considération.
On remarque également que des liens auxquels
nous n’avons pas accès depuis le site sont visibles pour le moteur
de recherche :
Si ces moyens de doper le référencement d’un
site web sont souvent qualifiés de « limites » dans des
circonstances ordinaires, ils deviennent indécents dans le cas
d’une crise humanitaire : le commun des mortels vous dira qu’il
n’y a rien de surprenant de la part d’un groupe comme Total. Il
reste cependant une question : la direction de Total est-elle
informée de ces procédés ? Rien n’est moins certain.
Comment trouver les mots clés ?
Dans Internet Explorer, cliquez sur « Affichage », puis «
Source ».
Les mots clés se situent au début, dans « meta name=’keywords’
».
1 - selon le baromètre Weborama - Takezo/Brioude de janvier
2004.
http://www.barometre-referencement.com
2 - selon Abondance.
http://docs.abondance.com/question42.html
A lire également :
http://www.communication-sensible.com/articles/article0046.php
* Didier Heiderich est l’auteur de «
Rumeur sur internet.
Comprendre, anticiper et gérer les cybercrises », aux éditions
Village Mondial, 2004.
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