Le 112 est le numéro d’appel à composer en cas d’une demande de
secours d’urgence dans un pays membre de l’union européenne. La
problématique est d’harmoniser les possibilités d’accès aux
urgences sans gommer les spécificités culturelles nationales.
Certains difficultés méritent d’être abordées et jugulées, comme
celle des voisins des frontières, qui vivent plus près des secours
d’un pays limitrophe que du pays dans lequel ils vivent et sont
administrativement du ressort du pays dans lequel ils sont
domiciliés ; médicalement, ne peut-on parfois s’affranchir des
limites administratives quand la santé des victimes est en jeu ?
L’enjeu d’instaurer un numéro unique en Europe permet d’espérer
que la phase ultime de l’harmonisation le permette.
En bref, la dynamique de la procédure
d’intervention en urgence repose sur plusieurs étapes. L’étincelle
est provoquée par un appel d’urgence. Dans certains pays, l’appel
aux services de secours sera automatiquement transféré au numéro
central d’urgence, dans d’autres états-membres, ce n’est pas le
cas. Ensuite, les secours se rendent sur les lieux de l’accident :
l’union européenne n’impose aucun délai maximal d’arrivée sur les
lieux. De fait, les services de secours français sont astreints à
arriver sur place dans l’heure qui suit la réception de l’appel.
Puis, la victime est prise en charge par les secours et conduite
dans les lieux où elle pourra être hospitalisée. Du fait de la
pénalisation croissante de la vie en société, des décharges de
responsabilité sont parfois exigées de patients refusant de
bénéficier de soins de première urgence. Par extension, quelle
transposition serait effectuée de cette attitude en intervention
pendant une catastrophe ? Si certains problèmes sont directement
issus de la mise en place du 112, d’autres lui préexistaient. La
mise en place du 112 représente aussi un nouvel ensemble de
possibles et ouvre un véritable marché de la communication des
unités de secours entre elles et du poste de commandement aux
unités, sur lequel se positionnent de grandes entreprises
industrielles européennes telles qu’Ericsson ou Alcatel. Ces
marchés présentent la particularité de lier entre eux ces
entreprises et les services publics nationaux impliqués dans la
gestion de l’urgence. Ainsi en est-il de la Direction de la
Défense et de la sécurité Civiles française. La gestion de
l’urgence pourrait être le vecteur d’harmonisation des services
publics communautaires et nationaux. La mise en place du 112
présente donc l’opportunité de poser les fondations de cette
intégration européenne des forces de secours. Elle présente aussi
l’avantage de permettre d’amorcer un dialogue entre les
institutions communautaires et les citoyens. En effet, le sujet de
la gestion de l’urgence renferme simultanément des
caractéristiques de « généralisme » propices à la définition d’une
structure, d’une part, et des applications au plan pratique, qui
ne sauraient être éludées sans qu’une partie importante du sujet
nous échappe totalement : la gestion de l’urgence naît de la
rencontre entre impératifs opposés. Là où la définition d’une
stratégie européenne de lutte contre les conséquences des
catastrophes nécessite de poser longuement les intérêts en
présence, afin d’arbitrer au mieux entre eux, la gestion
pragmatique des cas d’espèce commande une action rapide, du type
de la réaction et non de la stratégie planifiée. Or, pour être
durable, cette réaction à l’urgence ne saurait être le résultat
d’un réflexe de première instance. Les nombreuses réunions et
colloques tendant à souder des liens entre intervenants dans le
secteur de l’intervention d’urgence sont donc primordiales car
elles sont le terreau dans lequel germent les collaborations
entres services et, plus loin dans l’avenir, une véritable force
d’intervention commune contre les désastres ; la seule à avoir,
pour se construire, vaincu les multiples divergences pourtant
naturelles lorsqu’une démarche humaine à visée coordonnée se
construit. Le 112, un simple assemblage aura t-il un jour autant
de sens que le 911 aux Etats-Unis depuis les attentats du 11
septembre ? Le pari de toute l’Europe, derrière les services de la
Protection Civile européenne, est de ne pas attendre la
conjoncture favorable à l’émergence d’une nouvelle institution de
coordination sociale, mais de poser, en quelque sorte, le remède
avant que le mal n’ait émergé. Une vraie leçon de courage,
d’autant renforcée par la conviction que ce qui est investi
aujourd’hui en temps et en moyens humains et matériels ne sera
rentabilisé qu’à une échéance qui peut excéder la dizaine
d’années. Il nous est demandé, dès lors, de patienter sans oublier
la part que chacun de nous a dans cette éclosion encore à venir.
(*) Catherine Bodeau-Péan Ostermann
Travaux sur le risque référencés aux Presses Universitaires de
France (revue "Philosophie et Politique")
Site Web:
http://membres.lycos.fr/bodeau/
Elle est également l’auteur de deux articles particulièrement
lus sur le Magazine de la Communication de Crise et Sensible :
"Ressorts de l’attachement à la culture d’entreprise dans le
secteur nucléaire."
http://www.communication-sensible.com/articles/article0041.php
"La gestion de crises, un ensemble de problématiques
ancestrales revues sous le spectre de nouvelles exigences."
http://www.communication-sensible.com/articles/article0022.php
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