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Les cybercrises ne seront pas anarchiques.

Avec le glas qui sonne pour les start-ups, la reprise en main d’internet par les institutionnels normalise ce (nouveau ?) média, y compris dans les phénomènes de crise.

Pour l’anecdote, début 2000, un important investisseur rejetait notre business plan pour son manque d’ambition et nous expliquait préférer un projet de poterie sur internet qui devrait rapporter quelques milliards de CA en moins de 2 ans (véridique). C’était l’année folle du net, celle de toutes les libertés, la porte d’entrée vers un nouveau millénaire qui allait changer le monde. Souvenez-vous, en ce temps là, on parlait encore de nouvelle économie, de start-ups (avec son star system), de new money markers. Jeunes, talentueux, bourrés d’idées, fougueux, ils lançaient des concepts killers qui balayeraient des modèles économiques tombés en désuétude. Le monde était réinventé et il allait être détenu par une nouvelle génération dont l’ambition et les valeurs reléguaient Bill Gates au rang des misanthropes.

Et puis stop.

Et s’il en était de même pour les cybercrises ?
Créer son site web contestataire, lancer une rumeur, protester dans un forum… oui le net est un milieu " crisogène ". Mais de la même façon que tout à chacun peut créer son journal - que personne ne connaît - les sites web de protestation ne seront probablement bientôt plus que des coups d’épées dans l’eau. Dans ce domaine, comme dans celui de l’économie, rien ne change sur le fond.
En effet, alors que les annonceurs dépensent des fortunes pour engendrer du trafic sur leurs sites web comment imaginer obtenir une audience sur internet sans véritables relais médiatiques ? Que ce soit internet ou sur d’autres médias, les supports en mesure de générer une crise sont (ou seront) institutionnalisés. Mais le phénomène n’est pas nouveau : en réalité aucun site protestataire créé ex-nihilo n’a jamais eu pignon sur rue avant d’être relayé par des vecteurs établis.
Pourquoi ? Pour sortir du lot et des milliards de pages web, il existe en réalité peu de possibilités :

* la prime à la nouveauté, mais celle-ci s’épuise rapidement car le site web " anti-machin " n’a plus aucune originalité,

* le site web correspond à une crise avérée, mais la concurrence devient épouvantable car l’événement est une opportunité pour beaucoup d’individus ou de sociétés en quête de notoriété (voir l’article sur les noms de domaines déposés suite au crash du concorde),

* la cybercrise est le fruit d’un acteur connu ou émergent, mais déjà identifié,

* le crime, ce qui est à éviter, vous en conviendrez.

Le temps des prototypes appartient à l’histoire. Quel que soit le support, seule une institutionnalisation de l’émetteur de l’information porte ses fruits. Mais pour être accrédité et devenir un interlocuteur plausible – donc potentiellement relayé par les médias - le processus est long, même sur internet.

Il n’en reste pas moins qu’internet est un vecteur de plus qui possède ses propriétés, introduit de nouveaux comportements, accélère et catalyse les crises : même si l’anarchie ne règne pas en maître sur le web, le support n’est pas à négliger car sa " normalisation " en fait un vecteur crédible, banalisé… et utilisé.

10/09/01

Rédacteur : Didier Heiderich
Diffusé le Mercredi 19 Septembre 2001 
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